10 mars 2015 2 10 /03 /mars /2015 14:16

Il y a quelques jours, j'étais légèrement déprimé, sans douté éreinté par mes travaux annuels d'excavation de tronc. C'est que Germaine va sans doute bientôt pondre et une fois encore, il va falloir assurer.

 

Dans ces cas-là, j'ai tendance à me laisser aller, et à surfer sur mon écran de 5 plumes et demi. Et là, je tombe par hasard sur le site de l'ASFA. Jusque là rien d'extraordinaire, à part peut-être une observation de Balbuzard Caraïbe. Mais ceci est une autre histoire, dont nous auront peut-être l'occasion de reparler.

 

 

Les-Saintes-Terre-de-Bas-2012.jpg

 

Des Scinques aux Saintes !

 

Comme je vous le dis.

 

Les collègues de l'ASFA ont tout d'abord repéré en novembre dernier un individu à Terre-de-Haut, puis un groupe de quelques individus deux semaines plus tard, dans le même secteur. Ne me demandez pas exactement où, le secret le plus absolu plane pour le moment sur la localisation précise de ces "couleuvres batardes" ou "zandolis dorés", comme vous voudrez. Dans le même temps, un habitant de Terre-de-Bas montrait un spécimen capturé dans son jardin 5 ans auparavant.  

Je dois avouer que les troupes d'AEVA ont dans un premier temps été un peu vexées, étant en charge depuis 2012 d'une étude dont le but est d'en savoir le plus possible sur ces lézards, qui ont finalement été redécouverts depuis peu en Guadeloupe. C'est un peu notre bébé le sujet Scinques, nous y avons d'ailleurs consacré plusieurs articles sur ce blog :

Mission Tintamarre (2014)

Captain Titékay (2014)

Deux chasseurs sachant chasser le Scinque (2013)

Les amateurs de Scinques persistent et signent (2012)

Le club des Scinques (2012)

 

Mais il faut bien le dire, les Scinques sont à tout le monde. Nous avons pu aprofondir les connaissances sur leur présence, leur répartition, leur comportement à Petite Terre, la Désirade et Tintamarre à Saint-Martin. Mais les Saintes, c'est la cerise sur le gâteau.

 

Mon sang de Toto-Bois ne fit donc qu'un tour, et je sortis immédiatement mon petit magnéto à pédales, pour aller tirer les vers du nez (pour changer de les tirer de l'écorce), à Olivier Lorvelec qui en connaît un rayon sur les Scinques. Puisque c'est lui qui coordonne l'étude AEVA sur le sujet.

 

En avant-première donc, son analyse.

 

Desirade-Les-Galets-2014.jpg

 

Toto-Bois - Peux-tu nous rappeler les travaux d'AEVA sur les Scinques ?

 

Olivier - En 2012, nous avons mis en place un programme d'étude et de conservation, avec document de synthèse préparatoire, protocoles, obtentions de permis, et mise en place d'une collaboration internationale. Deux étudiants ont dans ce cadre travaillé sur leur répartition et leur comportement à Petite Terre et à Désirade. Avec les autorisations nécessaires, nous avons collecté du matériel sur Terre de Bas de Petite Terre, la Désirade et l’île Tintamarre. Nous sommes en relation avec Blair Hedges (université de Pennsylvanie) et Nicolas Vidal (Museum National d'Histoire Naturelle) pour les études de morphologie et de génétique (phylogénie et isolement) des formes correspondant à ces populations. Il est d’ailleurs possible que ces études aboutissent à la description de nouveaux taxons. Par ailleurs, nous recherchons d'autres populations de Scinques dans les Antilles françaises et nous communiquons largement auprès de la communauté scientifique et associative sur le programme et ses résultats préliminaires.

Les-Saintes-Cabri-Ponton-2011n-b-copie.jpg

 

TB - Des Scinques aux Saintes, ça t'étonne ?

 

OLIl n’y avait, jusqu’à présent aucun signalement confirmé de scinques aux Saintes. Cependant, comme sur les autres îles sans mangoustes, la présence de scinques y semblait possible. Le spécimen prélevé il y a 5 ans sur Terre-de-Bas et conservé en alcool, et les scinques observés à Terre-de-Haut, appartiennent probablement à une espèce non décrite du genre Mabuya ou du genre Capitellum, et peut-être même à deux taxons différents. Deux arguments permettent de poser l’hypothèse d’un ou deux taxons non décrits. D’une part, Hedges & Conn ont montré que les Mabuyinés ont évolué vers des formes endémiques micro-insulaires dans les Petites Antilles. D’autre part, les Saintes constituent un banc géologique différent de l’ensemble Grande-Terre et Basse-Terre (et leurs île et îlets satellites, dont la Désirade et les îles de la Petite Terre). Rappelons qu’Anolis, Sphérodactyles et Couresses des Saintes sont aujourd’hui traités au rang d’espèces endémiques et que des sous-espèces différentes sont présentes sur Terre-de-Haut et Terre-de-Bas dans le cas de l’Anolis et de la Couresse des Saintes.

 

TB - Donc il est fort problable que Les Saintes abritent une nouvelle espèce de scinques. Mais alors que faire maintenant ? 

 

Scinque-copie-1

  Je pose la question.

 

OL -  A priori, mais ce n’est qu’une réflexion préliminaire, les échantillons pourraient alors être exploités de la façon suivante.


Les Scinques de Terre-de-Bas et de Terre-de-Haut des Saintes mériteraient d’être décrits. Le spécimen de Terre-de-bas, en alcool, contient peut-être lui aussi de l’ADN exploitable. Ce spécimen et d’autres spécimens ou bouts de queues provenant des Saintes pourraient, s’il s’agit du genre Mabuya, s’intégrer dans une analyse génétique plus globale des relations phylogénétiques des espèces du genre Mabuya pour lesquels de l’ADN serait disponible (la Dominique, la Désirade, la Petite Terre, Grande-Terre ?, Terre-de-Bas des Saintes ? Terre-de-Haut des Saintes ?).

 

Toto-Bois - Merci Olivier de nous avoir donné l'exclusivité de cette interview. Nous suivrons avec attention les épisodes qui ne manqueront pas de se concrétiser. Scinque's story, saison 4 !

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