5 mai 2008 1 05 /05 /mai /2008 05:06
Samedi 3 mai, côte sous le vent de la Guadeloupe. Rencontre avec des Baleines à bec de Gervais (à confirmer, il semble que l'identification soit délicate entre différentes espèces de baleines à bec). De la veine pour la canaille.




Mesoplodon europaeus - Clichés P. Feldmann.

Quelques précisions trouvées sur le web . Il semble qu'on connaisse peu de chose sur cette espèce, qui vit probablement en petits groupes et en eaux profondes. Elle a été peu observée, même dans des zones très étudiées. Qu'en disent nos collègues d'Evasion tropicale ?
12 mars 2008 3 12 /03 /mars /2008 04:10
Racoon-Guadeloupe-copie-1.jpg
Illustration Tanguy Devielle - Bras-David en juillet 2001

Rakoun, rina, raton laveur, Procyon minor, Procyon lotor...

Autant de mots pour désigner un Mammifère présent en Guadeloupe, et qui est intéressant à plus d'un titre. Pour écrire les 15 premiers centimètres de cet article, je me suis largement inspiré des écrits de Lorvelec et al. (2007). Pour les 15 derniers, j'ai essayé de me servir de ma cervelle d'oiseau.

Jusqu'il y a quelques années, le rakoun était considéré comme une espèce endémique de la Guadeloupe (décrite par Miller en 1911 sous le nom de Procyon minor). Il avait été à ce titre placé dans la liste des espèces protégées par arrêté ministériel du17 février 1989. Louable intention. Le Parc National de la Guadeloupe en avait d'ailleurs fait son emblème, et la Poste a édité un timbre à son effigie. D'une façon générale, ce carnivore jouit d'un fort capital de sympathie, à cause de son aspect de gros nounours. Il était également très apprécié des chasseurs, pour d'autres raisons que nous aurons la pudeur de ne pas développer ici.

Dans son rapport n° 14 en 1996, AEVA émettait de sérieux doutes sur l'indigénicité (ça se dit ?) du rakoun, et proposait des hypothèses sur son origine en suggérant une analyse génétique pour positionner la population de Guadeloupe par rapport aux populations continentales. Et voilà que Pons et ses collaborateurs en 1999, puis Helgen et Wilson en 2003, ont montré grâce à des analyses génétiques et morphologiques que l'endémisme de notre nounours est très peu probable. La distance génétique entre les ratons laveurs de Guadeloupe et ceux de la côte est des Etats-Unis est quatre fois plus faible que celle trouvée entre ces derniers et ceux de la côte ouest des Etats-Unis, pourtant de la même espèce. Notre rakoun appartient donc très probablement à l'espèce Procyon lotor, largement distribuée en Amérique du Nord et en Amérique Centrale, et introduite en diverses régions d'Eurasie. Et il aurait été introduit en Guadeloupe depuis les régions côtières du sud-est des Etats-Unis. Il eût quand même été intelligent d'écouter les anciens avant de s'emballer. Dès 1911, Allen évoquait la possibilité d'une introduction. Malgré l'absence de témoignages archéologiques ou textuels, il faudra attendre les années 1970 pour que l'hypothèse de l'introduction soit à nouveau envisagée, et étayée par Lazell. Mieux encore, plusieurs publications guadeloupéennes du 19ème siècle ont indiqué avec certitude une introduction, qu'elles situent entre 1820 et 1840. Et ce n'est pas pour cafeter, mais nos recherches bibliographiques indiquent que Félix-Louis L'Herminier (en personne) a peut-être été l'auteur de cette introduction, à partir d'animaux provenant de la Caroline du Sud, en 1819. Heureusement, il n'est plus là pour nous intenter un procès en diffamation... 

Actuellement, l'espèce est présente en Basse-Terre, Grande-Terre, à Marie-Galante, à la Désirade, à Saint-Martin et à la Martinique.

Ciel ! De cet imbroglio il ressort que notre rakoun passe du statut d'espèce endémique à celui d'espèce introduite ! 
Bien. Tout cela nourrit le débat. D'autant plus qu'entre-temps, d'aucuns ont laissé entendre que depuis qu'il était protégé, le rakoun avait proliféré. Et qu'il était en train de devenir une sorte de nuisible comme on dit dans les terriers mal fréquentés. Mais oui, ces animaux peuvent manger des fruits, de la canne à sucre, des légumes, ou des poulets.  

Restent quelques questions ouvertes :

- quelle est l'importance quantitative de la population de rakouns en Guadeloupe, et quels milieux fréquente-t-il ?
- quel est son impact sur les milieux naturels ? 
- peut-on considérer le rakoun comme une espèce pouvant exercer une menace sur les écosystèmes forestiers peu ou pas anthropisés ? (à vue de bec, certains esprits éclairés pensent que oui)
- quel est son impact sur l'agriculture ?
- quelle conduite faut-il tenir sur son inscription sur la liste des espèces protégées ?
- si le rakoun n'était plus une espèce protégée, et s'il était admis qu'elle constitue une menace sur certains milieux, faudrait-il envisager des mesures de gestion et si oui lesquelles ?
- qui a cassé le vase de Soissons ?

Pour débattre ensemble sur la problématique des mammifères introduits, je vous invite à participer à notre réunion du mois d'avril. Si le grand manitou le veut, nous serons en mesure d'accueillir Olivier Lorvelec pour un exposé sur ce sujet.

PS : si vous saviez le nombre de mails qu'a suscité cet article au sein du bureau, vous n'en reviendriez pas. Le moins qu'on puisse dire, c'est que nous disposons d'un potentiel de réactivité certain.

Dernière minute (25/04/08) : Louis Redaud de la DIREN vient de nous transmettre une publication toute récente de Helgen (2008), indiquant sans ambiguité l'appartenance du Rakoun à l'espèce P. lotor, et pointant les risques que cette espèce peut faire courir aux milieux naturels par son caractère envahissant. Les tortues marines et les iguanes sont même cités comme cibles potentielles du Rakoun dans la Caraïbe...

Références
Allen G.M., 1911. Mammals of the West Indies. Bull. Mus. Comp. Zool., 54 : 175-263.
Helgen K.M., Maldonando J.E., Wilson D.E. & Buckner S.D., 2008. Molecular confirmation of the origins and invasive status of West Indian raccoons. J. Mammal., 89: 282-291.
Helgen K.M. & Wilson D.E., 2003. Taxonomic status and conservation relevance of the racoons (Procyon spp.) of the West Indies. J. Zool. London, 259 : 69-76.
Lazell J.-D. Jr., 1972. Racoon relatives. Man and Nature (Massachussetts Audubon Society, Lincoln MA), September 1972 : 11-15.
Lazell J.-D. Jr., 1981. Field and taxonomic studies of tropical American raccoons. National Geographic Soc. Reports, 13 : 381-385.
Lorvelec O., Pascal M., Delloue X. & Chapuis J.-L., 2007. Les mammifères terrestres non volants des Antilles françaises et l'introduction récente d'un écureuil. Revue d'Ecologie (La Terre et la Vie), 62 : 295-314.
Miller G.S. Jr., 1911. Description of two nex racoons. Proc. Biol. Soc. Washington, 24 : 3-6.
Pons J.-M., Volobouev V., Ducroz J.-F., Tillier A. & Reudet D., 1999.
 Is the Guadeloupean racoon (Procyon minor) really and endemic species ? New insights from molecular and chromosomal analyses. J. zool. Syst. Evol. Res., 37 : 101-108.
2 janvier 2008 3 02 /01 /janvier /2008 04:59

 

Tamias sibiricus - Source www.nundafoto.net/

Notre fidèle Liliane, toujours vigilente, me signale que la Maison de l'éleveur propose des écureuils de Corée, pour la somme de 72 euros pièce. Elle s'indigne à juste titre que ces animaux soient mis en vente, avec une probabilité proche de 1 que certains individus puissent s'échapper, ou tout simplement être relâchés dans la nature lorsque ces chères têtes blondes, brunes, rousses (ou leurs parents) en auront assez.

Tout juste remis d'un réveillon bien arrosé entre pics de bonne compagnie, j'ai immédiatement alerté le service compétent de l'association (en l'occurence, Olivier, spécialisé sur les espèces exotiques envahissantes).

Telle fut sa réponse :

'Vis à vis de la politique ministérielle à mener, j'ai proposé il y a quelques mois l'interdiction de vente de tous les sciurudés (écureuils) dans les animaleries. On est confronté avec les écureuils aux mêmes problèmes que ceux constatés avec les tortues  terrestres et d'eau douce vendues en animaleries (naturalisation et impacts sur le fonctionnement des écosystèmes, espèces proches remplaçant les espèces interdites, gros capital de sympathie rendant toute intervention très difficile...).

Effectivement, c'est un problème. Le Tamia de Sibérie (Tamias sibiricus), encore appelé Ecureuil de Corée, du Japon, de Sibérie, de Russie, selon sa provenance, est un animal de régions plutôts froides. Il a a priori peu de chance de s'implanter en zone tropicale. Ceci dit, on n'est pas à l'abri de surprises dans ce domaine.

A priori toujours, l'animalerie a le droit d'en vendre et c'est donc difficile d'interdire. Cependant, c'est à vérifier. Il faudrait déjà sensibiliser.'


Et vous, quelle est votre opinion sur la question ?

Nous avons sollicité la DIREN pour qu'elle organise une rencontre avec le responsable de ce magasin. L'idéal serait de lui faire comprendre les enjeux, et lui faire renoncer à commercialiser ces écureuils.

Pour mémoire, une espèce d'écureuil avait déjà été introduite en Guadeloupe, probablement à la fin des années 60. Dans son article (voir Lorvelec et al. 2007 dans la rubrique 'Publications'), Olivier indique qu'il s'agit d'un écureuil de l'espèce Funambulus pennantii, appelée Rat palmiste et nous rapporte les témoignages de deux membres de la famille Petrelluzzi : 

Un couple de ces écureuils aurait été acheté en 1968 à Orlando en Floride, et mis en cage sur un îlet du Petit Cul-de-sac marin, proche d'une centaine de mètre de Jarry. Ils se seraient échappés, et été à l'origine d'une micropopulation sur cet îlet. En 1975-76, 4 individus de cette population auraient été capturés, et mis en cage dans une résidence du Morne Fleuri aux Abymes. Même scenario, les écureuils s'échappent et fondent une autre population. On retrouverait aujourd'hui ces animaux sur les mornes Fleuri, Boissard, Melon, Audebert et peut-être au Jardin d'Essais.

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