29 mai 2012 2 29 /05 /mai /2012 22:19

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Un bon naturaliste se reconnaît à l'état de ses chaussures. Celles-ci assurément témoignent d'un goût certain pour le terrain, non balisé de préférence.

 

Ces croquenots nous ont conduits tout récemment à travers une sorte de paradis sur terre. Pour qui supporte l'absence de supermarchés bien entendu.

 

Quelques jours avec des objectifs bien précis, que nous avons poursuivis avec acharnement. Sans heureusement tous les atteindre. Au programme nous avions, dans le désordre : la station de gaïacs, l'orchidée mystère du plateau, et les scinques. Echec sur toute la ligne, mais nous avons découvert d'autres petits bijoux.

 

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La ravine Cybel qui ne nous a pas laissés passer son col.

 

 

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La ravine Portorique qui nous a interdit la descente. Nous estimons que les gaïacs doivent se trouver de l'autre côté de la vallée, pour le moment inaccessible.

 

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La crique du Grand Tabac (prononcer tabaque). Un oeil averti trouvera les 3 cabris.

 

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Un champ de collets à agoutis. Un agouti répondant au prénom de Marie-France a été piégé deux fois à moins de 30 secondes d'intervalle. Compte tenu de la densité de ces collets, les petites bêtes ont peu de chance d'en réchapper. Nous avons donc lâchement désamorcé les pièges.

 

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"La Rivière" qui nous mène à la mer.

 

 

 

 

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Et la nuit qui ne tardera pas à tomber sur la montagne.

21 mai 2012 1 21 /05 /mai /2012 20:02

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Excusez ce jeu de mots douteux. 

 

Une parttie du staff d'AEVA (5 personnes) revient tout juste d'une terrrible épreuve, le dénombrement des iguanes à Petite-Terre, avec l'aide d'Alain, Joël, Marion et Julien. Imaginez un peu : 4 jours de suite, parcourir les sentiers des deux ilets de la réserve, compter à droite, compter à gauche (nous avons d'ailleurs constaté qu'il y en avait un peu plus à gauche qu'à droite, c'est de circonstance. Mais l'explication tient sans doute au fait que du côté droit du transect, la végétation est peu propice au nourrissage des iguanes).

 

Quel rapport avec les scinques ? Eh bien il se trouve que les iguanes ne sont pas les seuls reptiles présents sur ce petit bout de terre. Si vous êtes tenace, que vous ne craignez pas trop la chaleur, et que votre vue est perçante, vous aurez peut-être la chance d'apercevoir pendant une trentaine de secondes un petit lézard couleur caramel se dorer sur une pierre plate.

 

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Il est assez mignon, mais guère plus que son cousin l'anoli illustré ci-dessus. Alors pourquoi un tel engouement pour le scinque ?

 

Parce que nous autres humains faisons grand cas de ce qui est rare. Le scinque, qui répond aussi au nom de Mabuya mabouya, est TRES rare en Guadeloupe. Je vous passe les détails de l'histoire des cinques des Antilles, laquelle histoire fera l'objet d'un article spécifique dans ce même blog. Ce petit lézard aux allures d'orvet n'a été  vu à Petite-Terre que dans les années 60, en 2000 (grâce à Olivier) puis en 2010 (grâce à Joël oeil de lynx). A partir de ce moment, nous avons sérieusement commencé à le chercher, et par voie de conséquence à la trouver. Les observations sont pour le moment très localisées, surtout sur un des murets transversaux de Terre-de-Bas de Petite Terre.

 

Pour compliquer l'affaire, ce scinque-là vient de changer de nom, il est maintenant connu des services d'immigration sous l'identité de Mabuya desiradea. Et connu uniquement de la Désirade et de Petite Terre. 

 

Exraordinaire non ?

 

Il s'est encore passé beaucoup de choses extraordinaires pendant ces quatre jours soit-disant dédiés aux Iguanes mais nous les gardons encore un peu pour nous.

30 avril 2012 1 30 /04 /avril /2012 17:07

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Des enseignants de 6ème du collège de Gourdeliane à Baie-Mahault ont un projet pédagogique axé sur Petite-Terre (quelle idée, un projet sur le Toto-Bois eût été bien plus intéressant). Les chères têtes blondes/brunes/rousses ont planché toute l'année sur le sujet, et le bouquet final est un voyage de 3 jours sur Petite-Terre au mois de mai.

 

Connaissant notre engouement pour les Iguanes, la responsable du projet nous a sollicités pour faire une intervention au collège, et plus précisément d'expliquer la méthode de dénombrement.

 

Expliquer le modèle de Bibby a des enfants de 12 ans, mission impossible ?

 

J'ai tenté de relever le défi, et ai passé une bonne partie de mon dimanche à plancher sur une présentation pé-da-go-gique. Bien calé sur une branche de prunier de cythère, j'ai fait jouer mes plumes et ma matière grise pour arriver à un résultat plutôt satisfaisant. Quand je pense qu'on ose nous traiter de cervelles d'oiseaux ou de têtes de linottes, nous autres pics, j'en frémis d'indignation.

 

Je vous livre ici le fruit de mon travail, ainsi que l'autorisation de l'utiliser comme bon vous semblera. Cliquez .

 

Et j'en profite pour dire bravo aux enseignants qui osent se lancer dans de telles entreprises. Et aux élèves qui ont l'air de connaître déjà beaucoup de choses sur la Réserve de Petite Terre.

23 avril 2012 1 23 /04 /avril /2012 13:22

 

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C'est à peu près le moment où les Tortues marines ont été inscrites sur les listes d'espèces protégées par arrêté ministériel en France. Et il faut croire que les papiers officiels et les coups de tampon ont permis d'aboutir à des résultats positifs en terme de protection de ces animaux.

 

Le raccourci est de taille, puisque pour arriver à connaître, suivre, éduquer, sensibiliser, réglementer... autour des Tortues, de nombreux acteurs ont mouillé leur chemise. Des associations dans un premier temps. Ce n'est pas pour me vanter, mais moi le Toto-Bois, j'ai été à l'origine du réseau Tortues Marines de Guadeloupe qui a commencé à sévir en 1998. Le premier document de stratégie a été rédigé par Olivier Lorvelec et Jacques Fretey. Au bout que quelques années, nous avons passé la main, il fallait professionaliser l'animation et la recherche de financements. C'est donc Kap Natirel qui a pris le relais, et qui a su fédérer le PMAT (petit monde des amoureux des tortues). Ce petit monde inclut les gestionnaires d'espaces naturels, les services de l'Etat, et j'en oublie certainement, les pluies torrentilles de ce week-end ayant altéré mes facultés mnémotiques de Pic noyen, déjà naturellement limitées.

 

Eh bien 20 ans c'est un nombre rond pour faire un bilan, ce que nous vous proposons à l'occasion de notre réunion de fin de mois. Qui exceptionnellement se tiendra en début de mois, il faut sortir des sentiers battus.

 

Vendredi 4 mai à 18h, à l'Université Antilles-Guyane, rendez-vous avec Eric Delcroix (ONCFS) et Laurent Malglaive (AEVA) pour une présentation des points forts de ces 20 dernières années.

19 mars 2012 1 19 /03 /mars /2012 13:40

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Malgré son allure modeste, ce poisson, comme bien d'autres dans le récif corallien, joue un rôle de premier plan.

En dehors de leur valeur estéthique certaine, les poissons herbivores contribuent à réguler la biomasse des algues qui envahissent les récifs antillais. Parmi les notables, citons les familles des Scaridae (poissons-peroquets), les Acanthuridae (poissons-chirurgiens) et les Pomacentridae du genre Stegastes (Demoiselles).

Ces espèces sont le plus souvent regroupées sous le vocable de "poissons herbivores", mais elles n'utilisent pas les ressources présentes de la même manière.

Que sont les niches trophiques ? Comment les étudier ?
Autant de questions auxquelles tentera de répondre Charlotte Dromard, lors de l'exposé de la réunion mensuelle du 30 mars (UAG, bâtiment de biologie marine, salle du 1er étage).
"Niches trophiques des poissons herbivores : exemple des Demoiselles".
Les bonnes habitudes sont donc reprises : la réunion AEVA se tient systématiquement le dernier vendredi de chaque mois à 18 heures. Tantôt à l'UAG, tantôt à l'INRA pour ne pas faire de jaloux.
Et il n'est pas interdit de régler sa cotisation (20 €) à cette occasion, ou de l'envoyer à l'ordre d'AEVA par bon vieux courrier postal à notre dévoué trésorier :
Mathieu Brossaud, 66 lot. Pointe d'Or, 97139 Les Abymes.
14 janvier 2011 5 14 /01 /janvier /2011 07:55

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Megaceryle torquata ssp. stictipennis - Cliché P. Villard.

 

 

L'accouchement fut difficile, mais le staff d'AEVA peut souffler : avec seulement 3 mois de retard (merci à nos financeurs pour leur indulgence), nous avons pu livrer le bébé. Un rapport d'une soixantaine de pages, photos incluses, qui permet d'apporter quelques réponses sur le statut de cette espèce en Guadeloupe.

 

Mais pourquoi s'intéresser à ce volatile plutôt qu'à un autre ?

 

Eh bien parce qu'à AEVA, nous avons tendance à faire ce qui nous chante. Et le Martin-pêcheur nous chantait, car c'est une espèce qui semblait devenue très rare en Guadeloupe, et peut-être donc menacée. Mais encore fallait-il disposer de quelques données factuelles pour le démontrer.

 

Les objectifs qui découlaient tout naturellement de ce questionnement étaient donc les suivants : estimer la taille de la population du Martin-pêcheur en Guadeloupe, cartographier les observations, proposer des hypothèses pour expliquer sa raréfaction, proposer des pistes pour sa conservation.

 

Comment donc nous y sommes-nous pris pour y arriver ? Dans un premier temps, un rapide coup d'oeil dans notre volumineux carnet d'adresse nous a permis d'identifier LA personne qui accepterait :

 

i) d'aller arpenter une quarantaine de rivières dans tous les sens sur la pointe des pieds pour ne pas effaroucher les oiseaux,

ii) de grimper sur les falaises de bord de cours d'eau avec une échelle pour voir si par hasard les trous dans les berges ne seraient pas des nids,

iii) d'aller faire un tour en Dominique voir si j'y suis,

iv) de passer tout ça dans la moulinette du système d'information géographique du Parc National,

v) et enfin de se soumettre à la critique des petits copains en leur proposant une première version du rapport.

 

Nous ne dévoilerons pas quelles furent les étapes les plus difficiles. Mais nous vous disons que cette personne, c'est Pascal Villard, qui avait déjà sévi sur une autre espèce que nous affectionnons : la mienne (le Pic de la Guadeloupe). Alors merci Pascal pour tout ce travail de terrain éprouvant. Je revois ta tête quand au bout d'un mois, tu n'avais toujours pas vu l'ombre de la queue d'un Martin.

 

Je n'en dirai guère plus, l'heure tourne et je dois retourner prendre un peu de repos sur mon Gommier rouge. Si 17 Mo ne vous effraient pas, je vous propose de télécharger le rapport en simple-cliquant . Avant la saison de la reproduction (pendant laquelle d'autres devoirs m'appelleront), je me fendrai d'un petit article de synthèse accessible à tous, et qui reprendra les principales conclusions de l'étude.

4 octobre 2010 1 04 /10 /octobre /2010 16:15

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Cliché Smithsonian Marine Station at Fort Pierce

 

Joli poisson me direz-vous, mais réputé pour être très venimeux, et pour entrer en compétition avec d'autres espèces de poissons. Pterois volitans, puisque tel est son patronyme, est originaire de l'océan pacifique et de l'océan indien. Il a été malencontreusement introduit en Floride en 1985, et n'a cessé d'étendre son aire de répartition du côté des Antilles.

 

Mais je n'en dis pas plus.

 

Claude Bouchon, maître de conférences à l'Université Antilles-Guyane nous exposera tout ce qu'il sait sur cette espèce, et sur son arrivée dans les eaux guadeloupéennes.

 

Rendez-vous vendredi 8 octobre à 18 h, bâtiment recherche, salle de TP de BV à Fouillole.

 

24 août 2010 2 24 /08 /août /2010 16:01

 

 ... un peu de pub...

 

La Réserve de Petite-Terre a mis en ligne son site... Cliquez sans plus attendre.

 

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"Ca y est les filles, on est sur Internet".

Petites sternes nichant à Terre de Haut de Petite-Terre, mai 2010.

9 août 2010 1 09 /08 /août /2010 09:00

Les interviews pas du tout imaginaires du Toto-Bois.

 

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Juvénile de Tafaliscinae. Cliché L. Desutter.

 

 

La semaine dernière, aux tréfonds de la forêt de Sofaia, j'essayais d'extirper un asticot d'une écorce trempée (je suppose que vous avez remarqué le temps qu'il a fait en juillet dernier). Je découvris alors une silhouette inhabituelle en ces lieux. Une femme courbée vers le sol, je dirais même plus accroupie, en train de farfouiller dans la litière. Encore un peu elle serait venue m'ôter le pain de la bouche, où plutôt le vermisseau du bec.

 

Ne cédant pas à l'impulsion première de prendre la fuite à tire d'ailes, je m'approchai de la quidame. D'un abord sympathique, elle accepta de répondre à mes questions, sans même s'étonner qu'un volatile de mon espèce fût doué de parole.

 

Toto-Bois (TB) - Comment t'appelles-tu, et que fais-tu donc dans la forêt ?

 

Elle - Desutter. Laure Desutter. Je cherche des Grillons.

 

TB - Pourquoi t'intéresses-tu aux Grillons ?

 

Elle - C'est le hasard qui m'a poussée vers eux. Moi ce qui m'intéressait étant étudiante, c'était la façon dont les animaux communiquent par voie acoustique. Alors ça aurait aussi bien pu être les grenouilles, ou les oiseaux, mais j'ai eu la possibilité d'étudier les grillons. Il faut dire que j'avais un goût prononcé pour les insectes, qui sont d'un contact plus facile que les vertébrés.

 

TB - Hi ! Moi aussi j'ai un goût prononcé pour les insectes ! Mais qu'est ce que les Grillons ont de particulier ?

 

Elle - Ils sont nocturnes, totalement inoffensifs et bons musiciens. En plus de ça, ils sont beaux. Sur des critères plus scientifiques si jamais ça t'intéresse, les espèces sont très diversifiées, surtout dans les forêts et dans les îles.

 

TB - Ah. Je commence à mieux comprendre la raison de ta présence. Et alors, quelle est leur importance en Guadeloupe ?

 

Elle - Pour l'instant, j'ai réussi à identifier à peu près 50 espèces, ce qui est beaucoup par rapport aux sauterelles et aux criquets. Chez les grillons néotropicaux, on trouve peu d'espèces banales à large aire de répartition, et donc beaucoup d'espèces endémiques.

 

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Femelle de Podoscirtidae. Cliché LD.

 

 

TB - Comment chantent-ils ?

 

Elle - Seuls les mâles adultes chantent, pour appeler les femelles. Ils relèvent leur première paire d'ailes, les élytres, les frottent l'une contre l'autre et en avant pour la stridulation. Une plage sans nervure, un peu élargie, présente sur les élytres, fait office de surface de résonance. La qualité musicale du chant des grillons s'explique par un spectre sonore très resserré autour d'une fréquence.

 

TB - Mais alors, peut-être peux-tu nous dire qui est ce qu'on appelle ici le forgeron ?

 

Elle - Celui qui fait "Tink... Tink..." ? Mais oui, c'est bien un grillon. Paragryllus martini, de la famille des Phalangopsidae. Les adultes vivent sous les écorces de la canopée. Ils mesurent plus de 5 cm de long, et sont beige marbré. Les mâles ont des éperons modifiés avec des glandes sur leurs pattes postérieures. On ne sait pas vraiment à quoi ils servent, peut-être pour maintenir la femelle pendant l'accouplement. Là où j'ai entendu le plus de forgerons, c'est justement ici dans la forêt de Sofaia, toujours la nuit évidemment.

 

TB - Sans vouloir être indiscret, dans quel cadre es-tu venue étudier ces insectes ?

 

Elle - Eh bien je fais partie du Museum National d'Histoire Naturelle, et nous avons pour projet de rédiger un mémoire sur les Orthoptères des Antilles françaises.

 

TB - Je tente une question qui fâche. Quel est ton point de vue d'entomologiste sur les risques liés aux prélèvements d'organismes vivants dans la nature ? Cela ne risque-t-il pas de nuire à la biodiversité ?

 

Elle - Il est nécessaire de faire des collectes pour connaître la biodiversité et être capable de la préserver. Mais je suis contre les inventaires par piégeage tous azimuts, ou les échantillonnages de masse, sans étude associée. Ce type de prélèvements est dangereux car il peut affaiblir ou faire disparaître certaines populations. Je pense qu'il faut toujours associer des observations sur la biologie lorsqu'on fait des prélèvements.

 

Encore elle - Une petite histoire pour finir. En Guadeloupe, il y a une espèce de grillons très commune dans les pelouses, Anurogryllus muticus. Eh bien cette espèce vit presque socialement. Les femelles vivent et pondent dans un terrier. Lorsque les jeunes ont éclos, elles les soignent en leur apportant à manger des petits fragments d'herbe.

 

Toujours elle - Et en cadeau spécialement pour les fidèles d'AEVA, le chant de deux espèces de grillons. Je dois avouer que l'espace acoustique guadeloupéen est occupé par les... grenouilles, qui font un vacarme dont je n'étais pas coutumière. Les grillons se font tant bien que mal une petite place dans ce tintamarre.  

 

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Amphiacusta Amphiacusta chantant. Cliché LD.

Podoscirtidae Podoscirtidae

  

TB - Incroyable ces mélodies. Mais nous reprendrons cette discussion une autre fois, car je dois rendre l'antenne (mauvais jeu de mots d'entomologiste). Merci Laure pour cet entretien et à vous les studios.

21 juillet 2010 3 21 /07 /juillet /2010 17:04

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Saintoises à l'ombre des amandiers.

 

Le Mercury Day est une manifestation qui mêle promotion d'une marque de moteurs, et festivités. A cette occasion, des centaines de plaisanciers se rassemblent et font la fête. Une société est en charge de l'organisation de cet événement, qui se tient depuis quelques années dans les eaux Guadeloupéennes.

 

2005, 2006, 2007 : le rassemblement se déroule à l'Ilet Caret.

2008 : il est interdit à Caret  par le Préfet, bien que cet îlet ne soit pas dans une aire protégée (ce qui montre que l'absence de réglementation restrictive n'empêche pas de prendre des mesures adaptées à un enjeu écologique). 

2009 : les organisateurs exportent le concept à Anguilla.

2010 : il est programmé les 24 et 25 juillet aux Saintes dans la baie de Terre-de-Haut, au lieu-dit du Fond du Curé.

 

Le maire de Terre-de-Haut est demandeur de cette manifestation. La Direction Régionale de l'Environnement n'a pas donné d'avis défavorable, compte tenu de la médiocre qualité écologique de la zone concernée. Le Préfet a donc donné son autorisation. 

 

Jusqu'à présent, tout va bien.

 

Il est en effet légitime pour les plaisanciers de profiter de la mer et de la période de vacances pour se retrouver dans une des plus belles baies du monde.

 

Il est également compréhensible que faute d'arguments scientifiques solides, les services de l'Etat rechignent à interdire une manifestation, prévue dans une zone qui ne fait partie d'aucune Réserve ni Parc National. 

 

Et puis tout de même, allez vous mettre à l'eau au Fond du Curé, on ne peut pas dire que les herbiers soient très étoffés, ni les tortues très abondantes. Il y a bien des populations d'oiseaux qui risquent d'être dérangées, mais pas de quoi fouetter un iguane que diable.

 

Pourtant, un tel rassemblement ne sera pas de petite ampleur dans cette baie. En quelques heures, des centaines de bateaux, donc des milliers d'usagers, disperseront dans le milieu une quantité certaine d'hydrocarbures, de matières organiques et de déchets non biodégradables.

 

Les promoteurs de la manifestation mettent en avant qu'il s'agit d'un moindre mal, puisque les fonds sont déjà dégradés. Soit. Mais il faut être conscient qu'il n'y a pas de site déconnecté des autres, et qu'aggraver l'effondrement écologique d'un secteur peut avoir des répercussions sur les autres. Ce n'est pas démontré dans le cas qui nous intéresse, mais dans de telles situations d'incertitude, pourquoi ne pas demander aux porteurs de projets d'en démontrer l'innocuité, conformément à la pratique des études d'impact ?

 

La Guadeloupe affiche des ambitions louables de tourisme et de développement, durables.

Elle a pour ça des atouts que la majorités des régions françaises lui envient : située dans un hot-spot de biodiversité, dotée du statut UNESCO de Réserve de Biosphère sur TOUT son territoire, bénéficiant d'une diversité de paysages exceptionnelle dans un si petit espace.

 

Des efforts importants sont consentis pour sauvegarder les espaces et les espèces les plus exceptionnels, par le biais d'espaces protégés. Le Parc National et les collectivités de "la zone d'adhésion" (c'est-à-dire en dehors de la zone de coeur) sont en train de négocier une charte. Elle posera les principes d'un développement respectant tant que faire se peut le caractère remarquable du territoire.

 

On voit donc que nous sommes loin de la nature sous cloche, confisquée à sa population pour mieux la préserver. Des projets sont d'ores et déjà engagés pour restaurer des milieux, et réintroduire une espèce emblématique, le Lamantin. Projet basé sur la prise de conscience des usagers de la mer qu'ils auront à changer leurs habitudes.

 

Quel rapport avec le Mercury Day ? Le changement d'habitudes, pourquoi ne pas commencer maintenant ? Pourquoi laisser perdurer un rassemblement qui ne présente d'intérêt ni général, ni culturel, ni sportif, ni traditionnel ? 

 

Et surtout qui donne une image incohérente et négative par rapport aux voeux (pieux ?), affichés à tous les niveaux,  d'un développement adapté au patrimoine exceptionnel de la Guadeloupe.

13 juillet 2010 2 13 /07 /juillet /2010 14:07

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Qu'est-ce qui rugit et gronde ?

Qu'est ce qui emporte régulièrement un ou deux passants ?

Qu'est ce qui vous épouvante lorsque vous la regardez en face ?

 

La Tigresse du Bengale ? La Lionne mangeuse d'hommes ?

 

Que nenni. Bien pis.  

 

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La rivière en crue.

 

Qui charrie comme si de rien n'était des arbres comme des fétus de paille ?

Qui rabote sans pitié les berges, laissant terre rouge à nu ?

Qui noye les vaches au piquet et emplit de boue les maisons trop proches ?

 

Qui envahit les nids de Martins-pêcheurs creusés à même les rives ?

 

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Toujours elle.

 

Qui vous fascine et vous attire ?

Qui vous remet en bonne place dans la mince pellicule vivante qui borde la planète (pas si nette) Terre ?

 

La 'Grande Rivière à Goyaves'. Elle est sortie de son lit à plusieurs reprises ces dernières semaines, comme elle ne l'avait pas fait depuis des années. Un tiers de mètre de pluie (presque la moitié de ce qui tombe chaque année à Paris) a débaroulé en un jour sur le bassin versant, s'est accumulés au détour des pentes, a formé des vagues et déblayé des roches énormes. 

 

Rien qu'une somme de gouttes d'eau.

 

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Pour finir dans le bouillon ! (jusqu'à la prochaine fois). Les photos sont de Philippe Feldmann, sauf celle du lion de la MGM.

18 juin 2010 5 18 /06 /juin /2010 12:50

L'envol de l'épervier

L’envol de l’épervier sur le lac Zumbi. La pêche assure aux foyers un revenu monétaire régulier. Cliché J.-L. Paul

 

Après quelques mois de calme plat, le cycle des exposés d'AEVA reprend...

Rendez-vous le vendredi 25 juin à 18 heures à l'UAG.

 

Jean-Luc Paul, Maître de Conférences en Anthropologie à l'Université des Antilles et de la Guyane évoquera cette question en se basant sur le cas d’un village de la plaine du Rufiji en Tanzanie.

 

Dans la plaine inondable du Rufiji, l’économie rurale se fonde sur deux activités principales : l’agriculture tournée vers

la production vivrière et la pêche, première source de revenus pour les villageois. La proximité de la réserve du Selous, la plus grande réserve terrestre africaine (50 000 km²) semble a priori n’être qu’un fardeau pour les communautés locales. Tandis qu’elles ne bénéficient d’aucune redistribution des gains engendrés par l’exploitation touristique de la réserve, elles supportent une grande partie des coûts liés à son existence : aliénation foncière sans contrepartie, destruction des récoltes par la faune sauvage, attaques léthales de la faune sauvages (lions, crocodiles, hippopotames) sur les humains. Mais c’est surtout l’annexion par la Réserve des zones de pêche les plus productives qui met les villageois dans une situtation économique dramatique.

 

Avec l’avènement en Tanzanie (comme sur le reste du continent africain) des politiques de conservation basée sur les communautés (Community Based Conservation) en substitution de l’ancienne politique 'Fences and Fines', l’espoir naît d’une meilleure prise en compte des besoins des communautés locales et d’une distribution plus démocratique des bénéfices tirés de l’exploitation de la faune sauvage.

 

A partir d’une étude anthropologique d’un village de Tanzanie situé à proximité immédiate de la réserve du Selous,  Jean-Luc tentera de montrer quels sont les impacts des politiques de conservation de la nature sur la reproduction des communautés humaines situées à proximité des zones protégées.

 

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Une case de champ sur pilotis (dungu), qui permet de dormir à l’abri des importuns (par ordre d’occurrence : cochons sauvages, phacochères, hyènes, panthères ou lions). Cliché J.-L. Paul

7 juin 2010 1 07 /06 /juin /2010 12:39

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Juvénile d'Iguana delicatissima dans un Gaïac - Cliché L. Malglaive

 

 

Après quelques années de relative tranquillité, les iguanes vont à nouveau être surveillés de près à Petite-Terre. Dans le cadre du plan national d'actions pour l'Iguane des petites Antilles, AEVA et les gardes de la Réserve naturelle des îles de la Petite-Terre se sont alliés pour dénombrer les iguanes.

 

Une première session s'est déroulée du 8 au 11 mai : 6 membres de l'association, les 4 gardes et le conservateur, René Dumont, ont travaillé ensemble pour bien caler le protocole de dénombrement sur Terre de Bas et Terre de Haut. Deux comptages complets ont pu être réalisés sur chaque île, selon une méthode classique en écologie. Elle consiste à estimer les densités d'animaux en les dénombrant le long de transects, dans des bandes fictives situées à différentes distances de l'observateur.

 

Les premières analyses graphiques ont été réalisées, on peut dire que la méthode marche bien et que les observateurs aussi ! (pas de points aberrants, chiffres proches d'un jour à l'autre).

 

Au programme, deux comptages annuels pendant le carême, avec comme objectif de pouvoir indiquer des tendances au gestionnaire de la Réserve, et évaluer l'impact possible des contraintes qui pourraient s'exercer sur cette espèce.

 

Quelques morceaux choisis de ces 4 jours passés en bonne compagnie.

 

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Fin de vie pour ces agaves, floraison signifiant mort prochaine - Cliché C. Pavis.

 

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 Trois compteurs hors pair, également bons conteurs. - Cliché C. Pavis.

 

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Première observation en 1998 (un individu) la seconde cette année (5 individus). Il s'agit du rare Scinque Mabuya mabouya - Cliché C. Pavis.

 

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Accouplement d'Anolis marmoratus de la sous-espèce chrysops - Cliché O. Lorvelec.

 

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Vieux pied de Gaïac. Dans cette partie Est de Terre de Bas, le feuillage des Gaïacs nous a paru très attaqué - Cliché C. Pavis.

 

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Une saline peut en cacher une autre. - Cliché C. Pavis.

 

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Une échasse blance (Himanthopus mexicanus) sur la saline 3 - Cliché L. Malglaive.

 

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Au rayon des bonnes surprises, un Goglu des prés en plumage nuptial (Dolychonix oryzivorus), à proximité du phare - Cliché L. Malglaive.

 

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Hybride entre un Cabiaï et un iguane ? - Cliché C. Pavis.

 

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Pour finir, le plus petit de la bande, le Sphaerodactyle bizarre. Vous avez dit Sphaerodactyle ? Cliché L. Malglaive.

7 mai 2010 5 07 /05 /mai /2010 09:05

Sirènes gommées

 

Qui ne connaît la légende des sirènes, dont les chants charment les hommes au-delà de la raison ?
 

Un peu d'histoire
 
En 1667, la vie est dure pour les lamantins en Guadeloupe*.

 

En 1998, la Réserve Naturelle du Grand Cul-de-Sac Marin élabore son premier plan de gestion. Un des super-objectifs est de réintroduire le Lamantin (Tricherus manatus), Sirénien probablement disparu des eaux de Guadeloupe au 18ème siècle à cause de la surexploitation (RP Pinchon, 1967)**.  On nous explique à l'époque que c'est un objectif symbolique, qui permettrait de fédérer les différents acteurs pour réhabiliter préalablement le milieu. Et lorsqu'on arriverait à une qualité écologique suffisante, alors on pourrait envisager une réintroduction.

 

En 2002, la DIREN produit une étude faisabilité de la réintroduction, document intéressant, mais peu étayé scientifiquement.
 
En 2009, la Réserve est intégrée par décret au Parc National de la Guadeloupe, qui hérite de fait de cet objectif. Entre-temps, on est passé de l'idée au projet. L'avis des scientifiques est sollicité, non pas sur le bien-fondé d'une telle réalisation, mais sur des questions biologiques, techniques, sociales...
 
2010, le projet avance.

On cerne maintenant un peu mieux les contraintes techniques de l'opération. Il est admis qu'il faudrait réintroduire la forme Antilles plutôt que celle que l’on rencontre en Floride***, qu'il vaudrait mieux prélever des animaux au sein d'une population de taille et de diversité importante (la Colombie semblerait une candidate possible), qu'environ 10 individus devraient être relâchés parmi lesquels 7 ou 8 femelles, qu'au bout de quelques années il serait souhaitable d'échanger les mâles introduits contre de nouveaux, pour apporter de la diversité génétique. Du bon sens et de la logique, néanmoins parfois un peu éloigné des contraintes de la biologie de la conservation en l’absence d’analyse sérieuse en génétique des faibles populations.
 
Moi, simple Toto des Bois, je me pose des questions.

 

  • Pourquoi réintroduire le Lamantin ?
  • Qu'est ce qui a changé dans le milieu qui fait que cette fois-ci, il se maintiendrait ?
  • Depuis 1998, en quoi la qualité écologique du Grand Cul-de-Sac Marin s'est-elle améliorée ?
  • Une telle opération apportera-t-elle un avantage pour la conservation de l'espèce au niveau mondial ?
  • L'espèce a disparu de l'ensemble des petites Antilles, y a-t-il une chance raisonnable pour qu'elle se maintienne en Guadeloupe ?
  • Quelle mine aurons-nous si les boat-manatees passent dans le Petit Cul-de-Sac ou émigrent vers d'autres îles ? 
     
    Ce que j'ai observé lors de mes très rares incursions en bordure de Grand Cul-de-Sac (j'ai horreur de voler à découvert) ne pousse pas à applaudir des deux ailes. Une route a été construite en lisière de forêt marécageuse, et les remblais perturbent probablement les écoulements. La décharge de Sainte-Rose s'est transformée en SITA Espérance, on annonce un important trafic de déchets par camion et bateau. Un pesticide dont je ne dirai pas le nom pollue pour quelques siècles les sols, les eaux, les organismes vivants. Le trafic des bateaux de pêche et de plaisance est loin d'avoir régressé, sans oublier les nouveaux venus : les scooters des mers, autrement appelés Jet skis. Et cerise sur le gâteau, le blanchiment des coraux s'est intensifié, l'écosystème marin n'est pas à la fête.
     
    Le Lamantin est évidemment très sympathique. L'expert scientifique qui suit le projet a même écrit dans la première page de son rapport que les actions de réintroduction étaient "nobles" (Reynolds & Wetzel, 2008). On n'est pas obligé d'être d'accord là-dessus. Par leur action, les humains ont fait disparaître une espèce d'un milieu. On aimerait croire que la faute est réparable. Réintroduction = Rédemption ? Ou bien Réintroduction = Communication ?
     
    Par corporatisme, j'aurais préféré qu'on focalise les efforts (mine de rien, tout cela mobilise du temps, des hommes et de l’argent) sur d'autres espèces. Au hasard : les perroquets, ou alors d’autres espèces en situation critique (mais moins médiatiques) et en train de disparaître aujourd’hui. Les perroquets en plus de l'aspect esthétique rendraient des services en forêt, en participant à la dissémination des graines !  Parce qu'entre nous, l'impact des lamantins sur la fréquentation touristique, je n'y crois pas. A moins d'organiser des visites sur site à grande échelle, ce qui ne paraît vraiment compatible avec la quiétude de notre Sirénien. Et puis qui va expliquer aux pêcheurs et aux plaisanciers qu’il va falloir, comme en Floride, se déplacent au ralenti ?? (je dirais même plus très au ralenti, par rapport aux pratiques et aux réglementations actuelles). Malgré l’attitude respectueuse des usagers de la mer aux USA, le premier critère d’identification des lamantins reste les cicatrices de blessures occasionnées par les hélices.
     
    Je pourrais caqueter pendant des heures sur le sujet, mais je crains de vous lasser. Notre rédaction vous invite à vous exprimer sur le sujet, en laissant des commentaires un peu plus bas... Sirene2.jpg

* “Comme la mer est extrêmement paisible dans ces deux Culs-de-sac et que la mer n’y est pas profonde, on ne saurait croire combien de lamantins, de tortues et tous les autres poissons se plaisent autour de ces îlets. […] Lorsque le canot est à trois ou quatre pas, le vareur darde son coup de toute sa force et lui enfonce le harpon pour le moins demi-pied dans la chair. La varre tombe à l’eau et le harpon demeure attaché à la bête, laquelle est à demi-prise” (Du Tertre, 1667).

 

* Mais comme l’ont signalé Lartiges et al. (2002), quatre ou cinq spécimens enlisés ont été pêchés après cette époque, en 1912, dans le Grand cul-de-sac marin de la Guadeloupe (Anonyme, 1917, 1929). Cependant nous ne savons pas si ces spécimens appartenaient à une population relique de la Guadeloupe ou s’ils provenaient d’une autre île. Lartiges et al. (2004) ont reporté ensuite un témoignage oral considéré comme digne de confiance, qui relate la capture d’un lamantin en 1929 dans la rivière des Grands Fonds, située au sud-Ouest de la Grande-Terre. Depuis, une photo de Lamantin a été prise à Saint-Martin en 1988 ! (Nicolas Maslach, communication personnelle). Mais mon petit doigt me dit qu’il s’agissait d’animaux erratiques. Aujourd’hui, le lamantin a disparu de l’ensemble des Petites Antilles (Ray, 1960 ; Husar, 1978).

 

** Les sous-espèces anciennement décrites ne sont pas reconnues par Soshani (2005). Il n'y a aucun spécimen de référence au Museum (Jacques Cuisin, communication personnelle). On ne pourra donc pas faire d'étude de génétique pour rechercher quelle forme était présente en Guadeloupe.


Références

  • Anonyme (1917). Nos paroisses de 1635 à 1912. Chapitre 3(2) : Bouillante et la Capesterre (Guadeloupe). Écho des Antilles. Revue mensuelle de N.D. de Guadeloupe, 60 : 376-383.
  • Anonyme (1929). Nos paroisses de 1635 à nos jours. Chapitre 6(1) : le Lamentin. L’Écho de la Reine de Guadeloupe, 103 : 88-96.
  • Du Tertre, R. P. J.-B. (1667). In Histoire générale des Antilles habitées par les françois. Fort-de-France. Ed. Caraïbes, Pointe-à-Pitre, Guadeloupe, 1973. Ré-édition d’après l’édition de Jolly, 1667-16671, tome 2.
  • Husar, S.L. (1978). Trichechus manatus. Mammalian Species, 93 : 1-5.
  • Lartiges, A., Bouchon, C. & Bouchon-Navarro, Y. (2002). Quel avenir pour le lamantin en Guadeloupe ? Étude de faisabilité de la réintroduction du lamantin des Caraïbes (Trichechus manatus) en Guadeloupe. Rapport, DIREN Guadeloupe, Bios Environnement et Univ. Antilles - Guyane, Guadeloupe.
  • Lartiges, A., Vernangeal, M. & Berry, G. (2004). Le lamantin et Manman Dlo dans la culture créole et dans l’histoire de la Guadeloupe. Rapport indépendant, disponible à la DIREN de la Guadeloupe, 33 pp.
  • Pinchon, R., R.P. (1967). Quelques aspects de la nature aux Antilles. Fort-de-France, Martinique, Imprimerie Ozanne & Cie, Caen, France.
  • Ray, C.E. (1960). The manatee in the Lesser Antilles. Journal of Mammalogy, 41 (3) : 412-413.
  • Reynolds, J & Wetzel, D. (2008). Reintroduction of Manatees Tricherus manatus into Guadeloupe, Lesser Antilles: Issues, Questions and possible Answers. Rapport d’expertise, PNG & MOTE Marine Laboratory, 13 pp.
    Shoshani, J. (2005). Order Sirenia. Pages 92-93, in Wilson, D.E. & Reeder, D.A.M., Editors. Mammals Species of the World: A Taxonomic and Geographic Reference. Third Edition, Volume 1. The Johns Hopkins University Press, Baltimore.

7 décembre 2009 1 07 /12 /décembre /2009 09:42

Il y a une quinzaine de jours, je suis sorti du (toto) bois, et suis allé me percher sur l'embrasure de la fenêtre d'un hôtel chic de Saint-Claude. J'ai pu ainsi assister à un certain nombre de débats, portant sur les espèces exotiques envahissantes (autrement dites "EEE"), et également profiter des pauses café, très bien fournies en viennoiseries de toutes sortes.

Mais que sont donc ces EEE ? Autant savoir de quoi on parle avant de discuter, les sources de malentendus étant par ailleurs suffisamment nombreuses sur cette Terre. Le groupe Outre-Mer de l'UICN-France (l'UICN étant l'Organisation mondiale pour la nature), et plus particulièrement les camarades de l'initiative UICN sur les EEE, nous en donnent cette définition (sortez vos calepins et prenez des notes) :

Il s'agit d'espèces animales, végétales, ou microbiennes, introduites accidentellement ou délibérément par l'espèce que l'on dit humaine, et qui se sont acclimatées, naturalisées, ont pris un caractère envahissant, et ont un impact plus ou moins grave sur les milieux et/ou espèces indigènes, sur l'économie ou sur la santé.

Diantre ! Ce qui revient à dire qu'aussi bien une plante faisant par exemple régresser l'effectif de la population d'espèces végétales indigènes, qu'un animal provoquant des pertes économiques dans le domaine agricole, qu'un microbe risquant de nous contaminer, peuvent être considérés comme des EEE ? En tous cas ce qui est sûr, c'est qu'en tant que seule espèce d'oiseau endémique de la Guadeloupe, je suis le contre-exemple parfait d'une EEE.

Mais ce qui revient aussi à relativiser. Selon Williamson & Fitter (1996), en moyenne 1 espèce introduite sur 1 000 devient envahissante.

Mais attention, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit : ces quelques espèces qui deviennent envahissantes peuvent à coup sûr provoquer des dégâts considérables dans nos milieux insulaires qui ont un défaut majeur : celui d'héberger des écosystèmes dysharmoniques. Ce mot barbare signifie que des groupes taxonomiques ou fonctionnels en sont absents. La biodiversité y est souvent faible mais le taux d'endémisme élevé. On a tendance à dire que toutes ces caractéristiques rendent les écosystèmes insulaires fragiles, notamment face aux espèces nouvellement arrivées.

Tout ça est un peu compliqué je vous l'accorde, je vais essayer de vous donner quelques exemples qui nous concernent de près.



Cliché INRA Guadeloupe.

On commence par quelque chose de facile à comprendre. La fourmi-manioc (encore elle, elle va prendre la grosse tête). Elle a tous les critères sans risque de se tromper : elle a été introduite, elle s'est installée, son aire de répartition a progressé, elle cause des impacts économiques et écologiques considérables (lourdes pertes en agriculture, attaque sur des milieux naturels et sur des espèces protégées (au hasard, fougères arborescentes)). Pour quelques révisions sur cet Hyménoptère, voir . C'est donc le cas typique de l'EEE qu'il conviendrait de fortement limiter, d'autant plus qu'elle épargne les îles avoisinantes. Egoïstement, pensons à Marie-Galante, et à la Martinique. Mais les petits copains des Antilles aimeraient bien aussi s'en dispenser.



Croquis C. Pavis.

Deuxième exemple, choisi cette fois-ci chez les végétaux. Le bambou. Quoi, le bambou ?! Cette magnifique Poacée (anciennement Graminée) serait envahissante ? !!  Alors qu'elle agrémente si bien nos bords de rivière et nos paysages ruraux ?! Dites-donc, vous ne seriez pas par hasard ce qu'on peut appeler des intégristes écologiques frustrés qui voudraient confisquer la nature au commun des mortels ? Je ne m'exprimerai pas sur ce point, mais une chose est sure : le bambou se trouve au coeur du Parc National, et si sa présence est souvent inféodée à l'activité humaine, cette espèce peut quand même coloniser des milieux sans qu'on le lui demande, par exemple en se bouturant et en se propageant grâce aux pentes, éboulis et autres vallées. Son impact est flagrant, et localement très inquiétant (route de la Traversée, routes des chutes du Carbet, crêtes du Nord au-dessus de Sainte-Rose...). Les dégâts en Martinique sont irréversibles; en Guadeloupe, il faudrait travailler très vite et très bien pour éviter cette extrémité. Les gestionnaires du Parc National ont d'ores et déjà commencé à évaluer différentes méthodes de lutte. C'est là que ça se complique un peu : lorsque l'EEE dispose d'un capital de sympathie auprès des populations humaines, il faut commencer à faire attention à ce qu'on dit si on veut être compris et suivi.


Cliché P. Feldmann.

Dernier exemple après je retourne dans mon trou : celui du raton-laveur (racoon, rina, rakoun...) qui a déjà fait couler pas mal d'encre (voir ) et presque de sang chez AEVA. Alors là, si je peux me permettre, je rigole. Jusqu'à il n' y a pas longtemps, le racoon avait la cote, espèce indigène, protégée par arrêté ministériel, chouchoutée par tout un chacun bien qu'ayant fait jusqu'à 1989 partie des tableaux de chasse de nos concitoyens. Curieusement, malgré cet engouement, bien peu de choses étaient connues sur le racoon en Guadeloupe. Tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes, jusqu'au jour où des scientifiques ont démontré par A + B que les racoons de Guadeloupe sont de la même espèce que les copains américains, et qu'ils ont été introduits entre 1820 (selon les naturalistes) et 1840 (selon la police). Donc si vos sortez vos calculettes, ça fait largement moins de deux siècles qu'ils sont là, ce qui est bien peu de choses en matière de processus écologique. Et que bien malin qui peut dire aujourd'hui si cette espèce n'a pas déjà eu ou n'aura pas un impact négatif sur les forêts proches de l'état primaire du massif de la Basse-Terre. On est là typiquement dans un cas compliqué réglementairement (il faudrait déclasser l'espèce, peut-être la lister comme espèce chassable, ce qui prend en général plus de temps qu'il ne faut pour le dire), médiatiquement (il faudrait expliquer aux gens que finalement ce n'est pas le bon gros nounours qu'on croyait), scientifiquement (il faudrait essayer d'en savoir un peu plus sur la bête, pour concevoir des méthodes de gestion appropriées) etc...

Je n'ai donc rien démontré dans ce cours magistral qui a dû en barber plus d'un, sauf qu'il est urgent de se mettre tous autour d'une table pour accorder nos idées, nos violons, nos compétences (si si, il y en a) dans le domaine des EEE.  Comme l'ont dit cette semaine les 'savants', les associatifs, les services de l'état, les voisins de la Caraïbe, les Ultra-Marins français (parfois dissipés...), les lacunes aux Antilles françaises et ailleurs dans ce domaine sont surtout liées à un manque de coordination. C'est vrai qu'on pourrait sortir un peu de notre train-train pour se mettre en ordre de marche au niveau local. Ensuite, il sera temps de coopérer avec la Caraïbe.

Pour trouver des informations sérieuses sur ce sujet, allez vite sur le site de l'initiative UICN EEE. Vous y trouverez aussi des références bibliographiques, une base de données très pratique et bien d'autres choses encore.

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  • : Le blog d'AEVA, l'Association pour l'Etude et la protection de la Vie sauvage dans les petites Antilles - Contact : aeva.totobois@gmail.com
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